Du le report “Dégradation des sols en régions arides: Des idées pour y faire face“, du Yassine Jamali, publié a Agriculture du Maghreb.
Les rendements céréaliers dans le Maroc pays sont corrélés à la pluviométrie, qui est considérée généralement comme LE facteur limitant de la production. Pourtant, un phénomène moins spectaculaire se développe de manière insidieuse et aggrave les conséquences de la sécheresse qui le masque. Il s’agit de la dégradation des sols à laquelle contribuent plusieurs facteurs, liés à l’évolution des pratiques agricoles.
Premièrement, l’extension des emblavures, nécessaire du fait de la croissance démographique, et permise par la mécanisation du labour et de la moisson, a presque supprimé la pratique de la jachère. Or la jachère permet un repos du sol, une reconstitution du stock d’humus, et un maintien de la diversité microbienne du sol. En fin elle interrompt nombre de cycles de pathogènes, en particulier les maladies cryptogamiques des céréales.
Deuxièmement la mécanisation de la récolte de céréales n’a pas eu d’équivalent pour la récolte des légumineuses. De ce fait, alors que la moisson mécanisée des céréales en bour coûte 200 à 300 dirhams par hectare, il faut compter 1.500 à 2.500 dh pour récolter manuellement un hectare de lentilles, pois fourrager, petit pois, ou fenugrec.
Aussi la culture de légumineuses perd de sa compétitivité face aux céréales et les surfaces diminuent, surtout dans les zones les plus arides. Le rôle des légumineuses dans l’assolement est bien connu: fixation d’azote via des microorganismes symbiotiques, et là encore, rupture du cycle des pathogènes et maintien de la diversité microbienne du sol. Troisièmement, l’extension des céréales s’étant faite au détriment des pâturages collectifs.
Les travaux de Lydia et Claude Bourguignon ont mis en évidence en France la disparition progressive de la flore microbienne du sol à cause d’un travail du sol excessif et de l’usage des engrais chimiques et des pesticides. Qu’en est-il de Maroc sols, après des décennies de monoculture céréalière et de surpâturage, sans aucun apport de matière organique? Le résultat serait probablement le même: une microflore tellurique réduite, appauvrie, déséquilibrée. Ceci est sans doute corrélé à l’évolution de la végétation adventice: la moutarde est devenue dominante, ce qui a peut-être une relation avec la réduction des microorganismes du sol. En effet la moutarde comme toutes les brassicacées, n’entretient aucune symbiose mycorhizienne et résiste mieux que les autres plantes à la disparition des mycorhizes. De plus, la moutarde est un concurrent pour le reste des plantes sauvages par allélopathie.