Du le dossier «POMMES DE TERRE. QUAND L’AGRICULTURE DE CONSERVATION A LA PATATE», du Victor LEFORESTIER, Schorsch GERL et Maxime MERCHIER, publié a Agriculture de conservation.
Si dans toutes les régions de production de pommes de terre on rencontre des producteurs qui se passent de charrues, rares sont ceux qui se passent d’outils animés, la plupart des producteurs utilisant soit des fraises ou des herses rotatives, soit la tamiseuse. La récolte peut s’effectuer avec des arracheuses traînées derrière un tracteur ou avec une automotrice mais dans tous les cas étant donné la quantité de produit récolté, elle nécessite d’entrer dans les champs avec des remorques qui vont rouler à peu près partout. C’est donc une situation paradoxale où on a une culture sensible aux défauts de structure mais qui peut abîmer la structure pour les cultures suivantes.
Pour des raisons économiques, la pomme de terre gagne du terrain dans toutes les régions productrices et chez les producteurs qui s’approchent de l’AC sur le reste de la rotation, il n’est pas question de la sortir de l’assolement. L’heure est donc aux échanges, aux essais, à l’imagination pour réduire l’impact sur le sol de cette culture. Poussée par une préoccupation environnementale ou agronomique, une dynamique nouvelle émerge où agriculteurs et techniciens cherchent à intégrer la pomme de terre dans des systèmes plus respectueux du sol.
Allemagne: protéger le sol de l’érosion. Les sols sont propices aux pommes de terre et la longueur des parcelles entraîne de l’érosion. Dans les années 1990, une poignée d’agriculteurs et de chercheurs ont donc cherché à garder un sol couvert le plus longtemps possible. La culture sur butte étant pour l’instant incontournable, ils ont décidé d’anticiper la préparation du sol à l’automne, de semer le couvert par-dessus pour revenir au printemps planter dans la butte sans la perturber.
Dans les essais menés à la ferme expérimentale de Scheyern, de l’université de Munich, une cape pour former les buttes équipait un néo-déchaumeur de type Smaragd. Chez les agriculteurs utilisant encore la technique, elles sont formées par une butteuse à cape passée séparément des déchaumages. Le couvert est semé à la volée et plusieurs espèces ont été testées: la moutarde blanche, la navette et la vesce d’hiver.
AB en Allemagne: couvrir les buttes dès l’arrêt de végétation. La piste qui a été recherchée par la station de recherche de Scheyern, de l’université de Munich est le semis d’un couvert à la volée au moment du broyage alors que la culture est toujours en place.
Belgique: le buttage d’automne remis au goût du jour. Depuis que Greenotec existe, le non-labour en pomme de terre a été testé et est aujourd’hui validé. L’hypothèse est donc qu’on peut améliorer la technique de préparation en changeant l’époque de travail du sol et en passant le relais aux racines des plantes, à l’activité biologique et aux agents climatiques pour le travail d’affinage.
Hauts de France: premiers pas en buttes d’automne. Du côté de la chambre d’agriculture du Nord – Pas de Calais, là aussi une bande de démo a été faite pour évaluer la faisabilité de la technique sur la plateforme qui accueillait le salon Qualipom à Méricourt en juin 2017. Les buttes ont été formées en août 2016 avec une fraise butteuse puis le couvert a été semé à la volée. Les buttes d’automne ont suscité la curiosité des visiteurs de Qualipom, si bien que quelques producteurs ont mis en place des bandes l’été dernier. De quoi multiplier les observations pour la campagne à venir. De l’Allemagne à la France en passant par la Belgique, les buttes d’automnes montrent des résultats encourageants qui devraient s’affirmer dans les prochaines années grâce à la mise en réseau des différents techniciens et agriculteurs.
Bretagne: couvrir les intercultures courtes. Bretagne Plant, la coopérative Triskalia, Cap Inov et le Syndicat de la vallée du Blavet réalisent depuis plusieurs années des essais de couverts «courts» et «longs» entre une pomme de terre et un blé ou avant une culture de printemps. L’objectif est de piéger les reliquats, de restructurer le sol, de protéger le sol de l’érosion et de ne pas labourer pour faciliter le contrôle des repousses de pommes de terre (qui peuvent poser problème dans les légumes).
Brendon Rockey en Etats-Unis: l’approche probiotique. Dans l’objectif de développer un sol vivant, la production de pomme de terre a donc un autre défi technique en plus de ceux évoqués précédemment, celui de réduire l’utilisation des produits phytosanitaires. Bien au-delà d’une technique en particulier, B. Rockey a mis en place un système cohérent qui gère les problèmes à sa place.